mardi 11 janvier 2011

Requiem for dissent

(Bad Religion)

Quand elle a perdu ses eaux, ma mère s'est immédiatement dit que l'hiver allait la geler sur place. C'est que sous son manteau, sa robe et un chandail long, j'étais pressé de crier à l'hiver : Fait Frette !

J'm'en souviens pas, mais parait que c'était la journée la plus froide de la décennie. Pis ma mère qui ne savait pas quoi faire, elle m'a laissé naître dans un banc de neige, alors que les ambulanciers n'étaient absolument pas au courant de la situation. C'est une femme qui a trouvé ma mère criant sur le banc de neige, qui l'a vue m'expulser hors d'elle.

Mais tout ça, je l'ai su il y a 10 minutes. Celle qu'il y a encore 11 minutes, j’appelais maman, pleurait doucement au près de l'homme que j'ai appelé papa pendant 24 ans. Hughes est mort il y a 3 jours, le coeur à lâché. Moi qui, jusqu'à tout récemment, ne soupçonnait pas même qu'il puisse en avoir un.

Mon ancien grand frère pleurait à chaude larme, et je commençais à vouloir faire de même. Il venait tout juste de perdre son père, tandis que moi, je venais de perdre l'esprit de famille.

Mais revenons en arrière de 4, disons 5 minutes 37 secondes, afin de savoir comment j'ai perdu 2 fois mes parents.

Mon frère regardait maman dans l'anti-chambre du salon funéraire.

- J'ai pris rendez-vous chez le cardiologue, comme tu me l'as dis. Il paraît que je fais de la haute pression.

Les yeux pleins d'eaux, il nous expliquait qu'il avait soudainement peur de mourir lui aussi. Puis moi même, pris de panique, je me suis questionné.

- Maman, est-ce que tu crois que je devrais faire pareil ? [ Puis le doute me pris] Pourquoi tu ne m'as pas parlé de ça ? C'est clair que moi aussi je suis à risque !

Maman pleurait. Par chance, elle s'était que très peu maquillé.

- Oui, c'est vrai François, toi aussi tu devrais aller prendre un rendez-vous avec un médecin, sait-on jamais...
- Ben non, y'en a pas besoin... lui...

C'est vrai qu'à 24 ans, les chances que mon coeur me tue sont assez mince, mais, parfois, il n'y a pas de chance à prendre. Je regardais les urnes ornant l'antichambre. Puis encore une fois, le doute vint se loger dans mon esprit. Pourquoi tant d'emphase sur : lui.

- Ben là Pierre, moi aussi je suis peut-être susceptible d'avoir des problèmes cardiaque. Papa, mon'oncle Paul du côté de maman, Jean-Louis du côté de Papa.

Ses yeux étaient pleins de colère. Il me maudissait en ce moment même, mais j'avais aucune idée pourquoi. Ma mère l'a regardé, sévèrement, avant de me serrer dans ses bras.

- Ben oui François, va voir un médecin, tu vas être fixé.
- Caliss Solange, dis lui donc.

Ma mère m'a serré fort dans ses bras, très fort, trop fort. J'ai eu l'impression que mon coeur se comprimait dans ma cage thoracique.

- T'auras pas de problèmes de coeur Franck, t'a été adopté.

J'ai cru que mon coeur avait lâché, mais finalement ce n'était que mes genoux, et je suis tombé sur la chaise derrière moi.

5 minutes 42 plus tard.

Je me suis levé, et je me suis dirigé vers le cercueil.
Tout les gens que je croyais ma famille se tenait proche du cercueil et pleurait. Et moi aussi. Ils avaient tous perdus un être cher, sauf Linda, la soeur de mon père qui faisait semblait de pleurer, parce que tout le monde sait qu'ils n'ont jamais été capable de se sentir. Et elle doit être contente, ça devient elle l'ainée de la famille maintenant. Si mémére Claudia crève, elle sera sans doute elle qui ordonnera la succession.

Solange et Pierre sont venus me rejoindre près du cercueil, et on s'est rien dit pendant le reste de la soirée. Pas qu'on avait rien à dire, juste qu'on aurait pas su comment le faire, et que de toute façon, on en avait déjà trop dit.

À un moment, j'ai été voir Solange et je lui ai murmuré :
- Je vais au toilette.

J'ai pris mon manteau, et je suis sorti.
2 inconnus fumaient dehors. J'ai jamais fumé, pas même du pot. Sauf une fois au châlet, mais c'est une toute autre histoire. J'ai jamais rien fait de mal, parce que Hugues et Solange étaient de très bon parents. Mais j'ai toujours eu une vie très rangé. J'ai jamais roulé plus que 110 sur l'autoroute, j'ai jamais viré une brosse, j'ai jamais...jamais pris de risques.

J'étais dans la lune, je regardais les 2 hommes fumés, je regardais leurs cigarettes.
- T'en veux l'jeune ?
- euh...
- Ben là, ça va pas te tué !

Il m'a offert une cigarette, et il me l'a allumée.

J'ai jamais exagéré, j'ai jamais eu d'excès, j'ai jamais...vécu ?
Je toussais dans les marches du salon funéraire. Au loin, des néons clignotaient, indiquant que le bar était ouvert. J'ai ramassé mon manteau, et j'ai mis les pieds l'un devant l'autre jusqu'à celui ci.

Plus je marchais, plus j'avais envie de pisser. Quand j'ai franchi les portes du bar, je me suis rendu compte que j'étais peut-être pas à ma place, mais fallait absolument que j'aille pisser.
Les toilettes étaient au fond, près des machines à sous. Enjambant les tables vides et les vieux saoulons, j'ai finalement rejoint la toilette.

Pendant que je pissais, un homme comptait de l'argent à côté du bol.
- Tu veux quelque chose ?
- Euh ?
- coke, hasch, pot ?
- D'la coke.

Fouillant dans sa poche, il m'a tendu un sachet : C'est 20 $

J'ai pris le sachet et je l'ai regardé pendant un moment. Je me suis senti comme dans un film, j'ai pris un autre billet qui logeait dans mes poches, je l'ai roulé et j'ai "sniffé" l'intégralité de mon sachet.

J'ai jeté le sachet, me suis lavé les mains, et je suis sorti.
La barmaid avait l'air d'avoir connu Hochelaga, au temps de J.Cartier.

- J'ai la bud en spécial.
- Non. J'ai besoin de quelque chose de fort.
- Un bloody ?
- euh...
- Extra tabasco.

2 commentaires:

  1. Très bien Ledz, l'utilisation du juste une fois au chalet...beau clin d'oeil médiatique. Extra tabasco sur la pizza de la belle place!

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